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Sexe, drogue et Rock N Roll

« Il faut être toujours ivre, tout est là ; c’est l’unique question. Pour ne pas sentir l’horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut nous enivrer sans cesse.

Mais de quoi? De vin, de poésie, ou de vertu à votre guise, mais enivrez-vous! »

Bon, à première vue ou plutôt écoute, je vous l’accorde Baudelaire ça parait pas très rock’n’ roll. Et pourtant, c’est bien son style poétique qu’on a qualifié de « pornographique » quand il a sorti son recueil les Fleurs du Mal en 1867

Pour parler de l’ivresse, même Pete Doherty peut pas rivaliser, même pas un kedger à la sortie de son premier OB

Vous l’aurez compris j’avais envie de revenir sur un des plus gros clichés musicaux, le credo « drogue sexe et rock n roll », et de me demander s’il avait finalement vraiment du sens.

Nombre d’artistes rock ont chanté les psychotropes, la volupté, les filles, les mecs, parfois tout ça réuni, on ne peut pas nier le fait que ce soit leurs sujets favoris. Du coup, ils ont souvent chanté les psychotropes sous psychotropes. Finalement, le rock est indissociable de ces plaisirs coupables ; mais c’est aussi ce qui fait de lui la matière musicale contre culturelle par excellence.

Clapton appelle un de ses titres Cocaine et le Velvet Underground enregistre le titre Heroin à demi conscient dans un studio new yorkais, Lou Reed nous chante qu’il se sent comme « le fils de Jésus ». Rien que des gens perchés, il y a même certains rockeurs qui nous disent que la drogue leur procure un sentiment de puissance créatrice, décuplant la dimension qu’ils souhaitent donner à leur musique. Alors, la drogue ferait-elle vraiment bon ménage avec le rock ?

Velvet Heroin

Eric Clapton Cocaine

Le 28 août 1964, Bob Dylan passe la porte de la suite des Beatles au Delmonico Hotel, Park avenue, New York. Cette rencontre va bouleverser l’histoire du rock. Les Beatles n’en sont qu’à leurs débuts, chantent encore ce genre de chansons un peu niaises (désolée pour les fans absolus) du style ‘I wanna hold your hand’ ou ‘Twist and shout’, Dylan se fout d’ailleurs un peu de leur gueule en disant que c’est de la musique pour midinettes. Bref, tout ce beau monde se retrouve dans cette chambre d’hôtel. Dylan boit de la piquette tandis que les Beatles dégustent du champagne. Devant Bobby stupéfait, les Beatles confessent ne jamais avoir fumé de weed, ce qu’il s’empresse de réparer. Mais ce jour-là, ce n’est pas seulement un joint qu’ils ont partagé, cette rencontre est un chassé-croisé d’influences, et surtout a complétement changé la production artistique des Beatles. Pour le meilleur et pour le pire, la drogue va annoncer le passage au psychédélisme du groupe, à l’exploration de nouvelles voies musicales avec des albums comme Sergent Pepper où Dylan apparaît d’ailleurs en tout petit sur la pochette…et à des chansons comme Lucy in the sky with diamonds qui est une évocation musicale du LSD, une musique en plusieurs phases, à plusieurs vitesses, avec des montées et des redescentes…

The Beatles Lucy in the sky

Bob Dylan

Mais est-ce que ce mojo connu de tous ne serait pas aussi le fruit d’une époque finalement beaucoup plus libérée que la nôtre ? Je veux dire, les meilleurs artistes rocks de tous les temps apparaissent au moment de la libération sexuelle, de la prise de psychotropes inconnus jusque-là, alors que s’organise le premier festival hippie de tous les temps : Woodstock, qui je le rappelle était prévu à la base pour accueillir 50 000 personnes. Mais les barrières n’ont pas tenu longtemps, et c’est un demi million de spectateurs qui se sont retrouvés devant Jimi Hendrix.
Cette insouciance quasi générale, elle n’existe plus aujourd’hui, aussi parce que cette découverte subite et démesurée de l’interdit en a laissé plus d’un sur le côté.

C’est le Festival d’Altamont en 1969, organisé par les Stones qui signe la fin de cette illusion généralisée, avec la mort d’un spectateur noir, poignardé sous les yeux de Mick Jagger et Keith Richards. Mick Jagger écrira par la suite le touchant Sister Morphine dont la guitare torturée ressemble à un appel à l’aide sans réponse.

The Rolling Stones Sister Morphine

Plus tard, dans les années 80 le mouvement rock underground est également très marqué par une débauche assumée, mais plus désespérée que le mouvement hippie-rock, plus sombre. La danse frénétique de Ian Curtis, chanteur de Joy Division et leur musique hypnotique nous fait ressentir toute la détresse d’un artiste atteint de crises d’épilepsie pendant ses concerts, contraint de se droguer aux barbituriques. On est loin du trip magique des Beatles sous LSD.

Joy Division Transmission

Les regrets, après la fête mais aussi les addictions, les démons, les overdoses donnent aussi malheureusement de très belles chansons. La Rehab d’Amy Winehouse ne suffira malheureusement pas à la sauver… créature sombre dont le destin est similaire à celui de Jimi Hendrix ou Janis Joplin morts eux aussi à 27 ans d’une overdose dans une chambre du Chelsea Hotel.

Amy Winehouse Rehab

La culture rock, parce qu’elle est à l’origine profondément contestataire et déteste les normes, les tabous (à part les Killers qui ont soutenu Trump) est, c’est vrai, profondément marquée par les drogues. Rares sont les rockeurs à assumer qu’ils sont clean, à part Bruce Springsteen.

Mais qu’importe, l’ivresse du rock c’est juste la folie de la transgression parfois torturée, qui sonne comme un conseil : celui de profiter un peu, parce que même si « Rock n roll can never die », à long terme on sera tous morts. Alors y’aura toujours une bouteille de jack cachée derrière l’ampli.

Lolo Garnier lui nous dit   « Music-Nothing to do with drugs »,  finalement rock et techno même combat, la drogue fait juste partie du folklore…

Laurent Garnier Flashback

 

Par Lily Decorse

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