Start It

00780838-000096-jpg-7069662

Prix, certifications… que valent-ils vraiment ?

La fin de l’année 2017 a été marquée, comme tous les ans, par cérémonies et autres évènements destinés à récompenser les « artistes de l’année ». Une belle année pour certains artistes largement gratifiés de « Single de l’année » ou encore ayant atteint des records de ventes de leurs albums certifiés or, platine…

On est fier d’eux pourtant ne s’est-on jamais indigné devant des résultats de cérémonies en les qualifiant d’injustes, voire truqués ? N’a-t-on jamais remis en cause la légitimité d’un album à recevoir la certification de triple disque de platine ?

 

« Nan mais c’est pas possible c’est la 4ème année qu’il gagne le prix de meilleur artiste alors que j’entends jamais parler de lui ! ». Prenez l’exemple des NRJ Music Awards : très concret et malheureusement trop représentatif de beaucoup d’autres cérémonies.

Tous les artistes nommés dans cette cérémonie sont produits par la même maison de disque dans les petits papiers de NRJ et de TF1. Les gagnants sont, par convention, ceux que celle-ci choisit de mettre en avant malgré un vote du public souvent contesté. Dans tous les cas, TF1 ne prend pas de grands risques puisque finalement tous les artistes présents à la cérémonie, gagnants ou non, en profitent pour faire leur promotion.

Pour les votes, qui ont l’air toujours plus injustes, il est normal que quand Tal gagne face à Céline Dion en 2016 dans la catégorie « Artistes féminines de l’année », bien qu’il ne faille pas mettre de côté le profil de la majorité de l’audience (soit les femmes et les 15-24 ans aux gouts musicaux contestables), on a quand même toutes les raisons du monde de remettre en question la légitimité des systèmes de vote. Excluant le talent ou les gouts musicaux, en termes de chiffres on est d’accord qu’il est étrange qu’une jeune française gagne face à une star internationale.

Dans le même esprit on peut aussi prendre l’exemple très récent des Victoires de la Musique dont la catégorie « Albums de musiques urbaines » a beaucoup fait parler d’elle en nommant les albums de Lomepal, Bigflo&Oli et Orelsan mais en omettant totalement des albums ayant tout eu autant de succès si ce n’est plus, comme Ipséité de Damso.

Vous remarquerez également que les cérémonies trouveront toujours le moyen d’inventer des catégories plus tirées par les cheveux les unes que les autres afin de pouvoir être sûres d’y présenter tous les artistes qu’elles souhaitent promouvoir. On attend avec impatience la catégorie « Artiste masculin francophone pop/rock/électro double flip salto arrière ».

Vous savez maintenant pourquoi M. Pokora et Jennifer, qui vendent toujours aussi peu de disques, ne cessent de gagner cette cérémonie au détriment d’autre artistes surement plus méritant (à l’échelle de ce qu’ils passent sur NRJ bien entendu il faut relativiser).

 

Avec le digital incluant le streaming et autres plateformes permettant d’écouter de la musique et faisant augmenter considérablement les chiffres, les certifications remises aux artistes sont, elles aussi, contestées.

Avant ce qu’on appelle communément « Internet », l’un des seuls moyens pour un artiste de se faire connaitre était de signer avec une maison de disque. Etape un peu plus compliquée que le partage d’une cover sur Youtube.

Malheureusement, ces maisons de disque, aussi importantes soient elles (on relèvera les plus grosses telles que Universal, Sony ou encore Warner) sont de plus en plus critiquées.

A l’ère du streaming qui est probablement le moyen le plus utilisé aujourd’hui pour « consommer » de la musique, les maisons de disque continuent à effectuer des grosses marges sur leurs artistes. Ces derniers étant dépendants de celles-ci et s’engageant à signer pour un certain nombre d’années, ils se retrouvent ainsi « prisonniers » du show biz. On peut prendre par exemple l’artiste Jamiroquai qui, après un conflit avec sa maison de disque avec laquelle il s’était engagé pour 7 albums, prend vraiment son temps pour sortir le dernier (soit 7 ans après) qu’il réalise simplement par obligation. Cela se ressent dans la qualité des titres qui sont, de loin, bien moins bons que les précédents.

 

Le moyen le plus simple pour les artistes de retrouver une indépendance, notamment dans l’industrie du rap, est donc de se délier de ces maisons de disque et de s’inscrire davantage sur les plateformes digitales. Mais à quel prix ?

 

Avant l’expansion du streaming il y avait plusieurs moyens de consommer de la musique : à travers les albums physiques (voir certains albums compilant les Hit du moment), à la radio ou bien même à la télévision. A travers ces supports, il n’y a aucun moyen de « se perdre » et de découvrir un artiste par hasard, contrairement aux plateformes de streaming avec lesquelles on peut sélectionner une playlist de façon totalement aléatoire et tomber sur des artistes inconnus qui correspondent pourtant au style recherché.

On pourrait avoir tendance à remettre en cause les certifications accordées par le SNEP (Syndicat National de l’Edition Phonographique) bien que celui-ci différencie les ventes physiques des streams. Pour les single : 1 téléchargement (sur iTunes par exemple) est égal à 150 streams. Pour atteindre le single d’or il faut 10 millions d’équivalent streams.

Si on prend Spotify par exemple qui est pour les artistes, comme toutes les autres plateformes de streaming, autant un moyen de communication qu’un moyen d’écouter de la musique puisque Spotify va choisir quel artiste mettre en avant, dans quelle playlist. Ce choix va nécessairement influencer le nombre de streams du son puisque sans même que vous ayez cherché à l’écouter vous allez le découvrir aléatoirement dans une playlist. Ce qui n’a pas tout à fait la même valeur que d’aller acheter l’album.

Cet engouement autour du streaming nuit cependant aux artistes. C’est un peu comme les séries. La musique se popularisant de plus en plus, notamment chez les jeunes, plus personne n’a envie d’acheter l’album de chaque artiste qu’elle souhaite écouter. Imaginez devoir attendre qu’une série sorte en DVD avant de vous rendre dans la Fnac la plus proche pour vous procurez le coffret pour la modique somme de 46,99€ au risque de vous faire spoiler et que vous ne possédiez même pas le matériel dans votre pauvre appartement étudiant pour le lire.

Pour la musique c’est pareil : on préfère payer 10€ par mois un abonnement nous permettant d’écouter n’importe où, n’importe quand, n’importe qui. Ce n’est pas un reproche que l’on fait au streaming, il s’agit tout simplement d’une évolution de la société qui se digitalise, qui nous est bénéfique et que malheureusement les artistes subissent. Certains nous le font même parfois savoir assez radicalement : on se souviendra de Taylor Swift en 2014 qui avait décidé de retirer toutes ses chansons des plateformes Deezer et Spotify car selon elle « La musique ne devrait pas être gratuite ». On vous rassure (ou pas) elle a vite changé d’avis, a trouvé un autre moyen de faire de l’argent et s’est bougée pour faire plus de concerts.

Finalement, le streaming nous ramènerait presque à la naissance de l’artiste puisque celui-ci doit nécessairement établir un contact live avec ses fans pour justifier de sa notoriété et de ses revenus. Ce qui n’était pas le cas à l’époque, quand les artistes réalisaient beaucoup moins de tournées et d’une bien moins grande ampleur. Aujourd’hui, pour séduire le plus grand nombre, paradoxalement, ils ne peuvent plus se contenter d’être des produits marketing et doivent prouver leur valeur sur scène pour notre plus grand bonheur !

 

Fanny Laurent

partager

Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur pinterest
Partager sur print
Partager sur email
Vous aimerez aussi
Vald, comment sortir de la prison du succès ?
L’histoire d’Aphex Twin
L’AFRO OU LES TRESSES À LA CIGALE, LE CONCERT DE LA CONSÉCRATION