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[INTERVIEW] Rendez-Vous : Insolente pudeur

À l’occasion de leur passage au BT59 (l’Iboat y était délocalisé) le 17 avril dernier, Lily et Nina ont pu discuter avec les cinq membres du groupe Rendez-Vous.

 

  • Après votre venue au Climax en 2018, vous êtes de retour ce soir au BT59 pour la soirée organisée par l’Iboat. Vous suivez un peu la scène post-punk/cold-wave bordelaise?

 

Elliot : Oui, notamment le duo qui fait son come-back : Kap Bambino. On va bientôt jouer avec eux d’ailleurs.

 

  • Rendez-vous en anglais signifie “rencard amoureux”. Ça a été un “date” amical ou plutôt musical entre vous?

 

Elliot : On s’est connus pour faire de la musique et on est devenus potes très vite, mais à la base c’était uniquement pour la musique.

 

  • Pourquoi avez-vous choisi d’intégrer un batteur, Guillaume Rottier?

 

Elliot : Pour que le live évolue un peu et puis l’album a été fait avec pas mal de drums acoustiques même si ça a été re-samplé, c’était quand même des sons qui étaient acoustiques à la base. Ça avait plus de sens au niveau de l’énergie et du son d’avoir un vrai batteur.

 

  • Votre 1er album, Superior State est plus brut que les EPs précédents dans son esthétique musicale mais également par le choix de la pochette. Est-ce que cela est volontairement en lien avec l’époque actuelle, que vous décrivez comme “paradoxale et violente”? Avez vous voulu traduire tout cela en musique?

 

Elliot : Oui, certainement. Ce n’est pas forcément très défini, enfin ça l’est dans nos têtes, on aime bien que ce soit assez métaphorique. Même si le visuel est assez explicite et que l’on comprend assez vite ce qu’il représente, c’est forcément le reflet de l’époque. Je pense que notre musique traduit un contexte.

Maxime : Ça se fait par une succession de choix au fur et à mesure de la fabrication de l’album. Un choix après l’autre nous a amené à ce résultat.

 

  • Est-ce que vous considérez que dans votre musique vous voulez dégager quelque chose de nihiliste, pessimiste par rapport à l’avenir de notre société ?

 

Elliot : Oui c’est pas très encourageant. (rires)

 

  • À la sortie de Superior State, les presses spécialisées comme généralistes ont beaucoup parlé de vous, ça fait quoi d’être encensé par le Figaro quand on est un groupe punk?

 

Maxime : C’était pour Distanceon était assez surpris ! Le mec était très cool on lui a dit qu’on était un peu étonnés. Ils essayaient de développer un nouveau truc, un peu plus musical. Mais bon, le Figaro c’est pas notre journal de référence.

 

  • Vous avez fait pas mal de collaborations sur cet album, notamment avec Matt Peel au mixage et Sarah Register au mastering, c’est pas mal de nouveauté pour cet album.

 

Elliot : Pour le mastering on avait déjà bossé avec Sarah sur l’EP. À la base pour le mixage on voulait rebosser avec le même mec qui avait fait Distance, mais c’était compliqué au niveau de l’organisation parce qu’il était à New York. On a trouvé Matt Peel, il avait fait des projets qui n’étaient pas forcément dans notre style mais on pensait qu’il y avait quelque chose d’intéressant à faire avec ce mec qui pouvait garder un style assez crade tout en faisant un projet assez lourd.

 

  • Votre EP Distance était sorti sur le label italien Avant!Records, pouvez-vous nous parler d’Artefact votre propre label et de votre relation avec Crybaby?

 

Elliot: On voulait créer notre structure pour que l’on soit libre de faire ce que l’on veut et d’avoir un calendrier qui nous appartienne sans attendre toute l’organisation d’un label (avec leur sorties et tout ça) et d’être complètement autonomes vis-à-vis de nos choix esthétiques.

Je connaissais les filles de CryBaby, elles avaient un label qui s’appelait “Kill The Dj” avant. À force de parler avec elles, elles nous ont proposé de monter le truc comme ça, une co-production où elles pouvaient bosser le côté label, qu’on ne maîtrise pas. On a besoin d’avoir des gens qui nous entourent pour ça et en même temps on restait assez autonomes ce qui est assez pratique pour nous. Et elles ont super bien bossé là-dessus.

 

  • Et comptez-vous le développer vraiment en tant que label et produire des artistes?

 

Elliot : Éventuellement, on y pense pas encore parce que là on est vraiment la tête dans l’album et dans la tournée mais c’est un truc qui pourrait arriver oui.

 

  • 5 ans après votre premier EP, vous sortez ce premier album, votre public était très impatient de cette sortie. Alors que beaucoup d’artistes enchaînent les albums, c’était important pour vous de prendre du temps? Aviez-vous une certaine pression face au succès des deux EPs précédents?

 

Maxime: Peut-être pas de pression mais l’envie de confirmer un truc. Après on était très contents d’avoir fait les deux EPs avant cet album. Au moment de faire Distance on avait pas envie de se jeter tout de suite dans la création d’un album. On avait déjà des morceaux et on voulait que ça sorte assez vite. On cherchait encore un peu notre son et une identité, même si on avait commencé à le faire sur le premier.
On écoute pas beaucoup d’albums en entier, on était vraiment pas pressés d’aller sur ce format long. Mais après Distance, on voulait élargir le spectre de ce que l’on faisait et le format plus long nous le permettait. On sentait aussi qu’il y avait une attente à ce niveau là.

 

  • Vous vous verriez retomber dans le format EP?

 

Maxime : Oui carrément, à fond. L’album c’est quand même un truc assez lourd et on a pas forcément envie d’attendre deux/trois ans avant de sortir quelque chose. Et puis le format EP c’est vraiment un truc qu’on aime bien. Donc oui ça risque d’arriver.

 

  • Cet album est quand même différent des autres, notamment le fait qu’il n’y ait plus de boîte à rythme, est-ce que vous pensez avoir touché un nouveau public, que vous ne touchiez pas avec les EPs?

 

Elliot: C’est toujours un peu compliqué de savoir si c’est parce que ta musique a évolué que les gens t’écoutent plus ou c’est parce que tu sors un album et que tu as une projection médiatique qui est différente. Le format album te permet d’avoir une mise en avant un peu plus large dans la presse. Il y a des trucs plus bruts mais également plus légers que sur Distance par exemple “Sentimental Animal” je ne pense pas que sur Distance il y ait un morceau aussi léger.

Maxime : Peut-être qu’avant on était un peu cloisonnés dans le truc post-punk/cold wave, limite gothique. Avec l’album on s’est un peu libérés de ça, en tout cas on voit que notre public est beaucoup plus large que cette niche là. C’est une découverte qui nous a fait plaisir car on est pas spécialement à 100% dans ce style là, même si on écoute plein de cold wave, on aime bien que ce soit un peu plus brassé.

 

  • Il n’y a pas longtemps on a reçu le duo Poison Point, qui eux, font une musique bien plus EBM. Et le chanteur nous disait que les paroles n’avaient pas forcément une grande importance comparé à l’aspect instrumental et la rage qui s’en dégage. Est-ce que pour vous il y a une réelle importance des paroles, est-ce aussi important que la musique ?

 

Francis : Pour moi oui mais pour vous peut-être pas.

Elliot : Pour toi oui parce que tu écris les paroles. Mais moi je suis assez d’accord avec Poison Point, surtout que ce n’est pas ma langue maternelle l’anglais, même si je la comprends et que les mots ont une vibration, c’est plus l’énergie de la musique.

Maxime: C’est pas des chansons à message, je pense. C’est plutôt des punch lines, très métaphoriques.

Elliot : Il y a un truc très métaphorique dans les paroles qu’écrit Francis. Ça laisse un libre arbitre pour imaginer plein de choses différentes et du coup on aime bien ça.

 

  • Ces paroles sont plutôt inspirées de quelque chose d’abstrait et de ce que vous voyez dans l’art en général, le cinéma, la littérature qui vous inspirent, plutôt que par le concret ?

 

Elliot: Oui d’une certaine façon, c’est intéressant. Je sais que moi perso, je suis touché par plein de choses. J’ai du mal avec les trucs qui sont trop frontaux et très expliqués, même quand j’écoute de la musique j’aime bien imaginer des trucs et m’approprier les choses.

 

  • Qu’est ce qui vous a inspiré comme musique ?

 

Elliot: On a tous écouté pas mal de post-punk et de punk. Il y a plein de choses qui nous ont influencé, il n’y a pas un truc où on s’est dit un moment “Ah bah voilà c’est exactement ce qu’on a envie de faire”.

 

  • Un artiste ou groupe vous a vraiment marqué ?

 

Elliot : Bowie m’a vachement influencé quand j’étais gamin.

Simon : J’ai beaucoup découvert via les vidéos de skate. Je faisais vachement de skate quand j’étais petit. Dans la période 2000 où Internet n’était pas encore trop développé j’écoutais vraiment les bandes sons des vidéos. Elles étaient super diversifiées, tu avais aussi bien du punk que du rap. C’est grâce à ces vidéos que j’ai découvert plein de musiques. Ça m’a fait aimer différents styles. Quand je faisais du skate on téléchargeait dès qu’on pouvait les BOs des vidéos. Ça a produit un mélange d’influences.

 

  • Vous prenez plus de plaisir à enregistrer l’album et le travailler en studio ou transmettre votre musique en live ?

 

Maxime : Originellement, le boulot de studio c’est vraiment ce qui nous a fait bosser ensemble et monter le groupe. L’étape de création première c’est le plus excitant. Après avec les années on a appris à apprécier vraiment le live et à développer quelque chose de ce côté là, chose qu’il n’y a pas forcément dans les disques. Mais la raison première pour laquelle on fait de la musique c’est pour le côté création studio.

 

  • Il vous est arrivé de sentir des publics pas du tout réceptifs à votre musique?

 

Maxime : Oui, je pense que ça peut arriver à tous les groupes, surtout au début.

Elliot: Ça nous est arrivé il n’y a pas longtemps. On s’est retrouvé un lundi dans un tout petit bled mais dans une grande salle, c’était un truc gratuit c’était très bizarre.

Simon : Notre musique est assez immédiate et impactante, donc s’il n’y a pas une réaction tout de suite assez frontale et physique, ça ne prend pas. Sans forcément générer un pogo de malade tout de suite, il faut un peu d’énergie.

Elliot: L’autre jour on a joué dans un festival à Niort, c’était bien et il était complet il y avait plein de gens mais c’était très “quarantenaires statiques” et c’était très chelou.

 

  • Vous allez enchaîner avec une tournée de festivals notamment Dour. Quel est l’avenir de Rendez-vous ?

 

Elliot : On tourne jusqu’à l’année prochaine à peu près, on va se concentrer un peu là-dessus et essayer aussi de bosser en studio et chez nous pour composer d’autres trucs. Là on a pas eu trop le temps alors qu’on a très envie de faire d’autres choses. Mais bon c’est vrai que pour l’instant on a plein de trucs prévus même si on a un peu plus de temps à la rentrée. Même si pour le moment c’est la tournée, on a envie d’évoluer et de sortir de nouveaux morceaux assez vite.

 

Les découvertes musicales de Rendez-Vous : 

Crack Cloud

 

Live Report du 17 avril 2019 au BT59

 

Lily Decorse & Nina Kulundzic

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