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Le procès de Damso : Foot, féminisme et rap…encore une sale histoire

Dernièrement, la fédération de football belge a mis un terme à son partenariat avec Damso pour la composition de l’hymne des Diables Rouges au mondial de football. Et ce, grâce ou à cause d’une association féministe belge (je n’ai toujours pas choisi mon camp).

En tant que féministe et grosse consommatrice de rap, la crise schizophrénique me guette.

 

Les féministes pointent du doigt le rappeur pour ses paroles sexistes et insultantes dans ses titres, et soulignent le fait que ce ne soit pas le choix d’artiste le plus judicieux pour fédérer une nation. Certes.

 

Dans une société dans laquelle environ un belge sur cinq estime qu’un viol est « justifiable sous l’influence de boisson ou de drogue » (Chiffres de 2016 de la commission européenne), dans laquelle des hommes comme Weinstein, Allen ou Polanski sont encore idolâtrés par de nombreuses personnes et dans laquelle des députées se font encore siffler à l’assemblée parce qu’elles portent des robes à fleurs, peut-on vraiment leur en vouloir de dénoncer la verve « très féministe » d’un Damso idole des jeunes ?

 

Tu ne voudrais pas que ton petit frère/neveu/copain/animal de compagnie parle de ta mère/sœur/copine/tante etc.  de la même façon dont Damso  parle des femmes. (On laisse les mamans tranquilles. Damso sera le premier à te le dire)

Donc la démarche est compréhensible. Garde ton terme de « féminazi » bien au chaud sous ta langue.

 

“J’te vois comme Jay-Z voit Beyoncé, une salope que je n’ai pas besoin de financer” – Débrouillard, Damso

 

Néanmoins, ce qui est oublié, et cela est fréquent lorsqu’il est question de rap, c’est que le rappeur est un personnage imaginaire. Bizarrement, on ne va pas invectiver un acteur jouant un rôle controversé au cinéma, il n’y aura pas de confusion. Dans le rap, l’homme et son image médiatique sont confondus.

 

Si on part de ce raisonnement et que l’on fait un état du rap aujourd’hui, alors on part du principe que tous les rappeurs sont des pervers misogynes dans la vie de tous les jours. Eloïse Bouton, journaliste et cofondatrice de Madame Rap, souligne qu’entre 22 et 30% des paroles de rap sont sexistes et plus de 67% des paroles de rap objectivent sexuellement les femmes.

 

Alors oui, le rap est sexiste mais le rap d’aujourd’hui c’est également une FICTION construite sur le mythe de l’égo-trip, de l’ultra virilité et surtout du SECOND DEGRÉ.

Orelsan, par exemple, est le même homme qui a écrit le titre Sale Pute pour lequel il a été trainé en justice et le titre Bonne Meuf dans lequel il décrit le quotidien drastique des femmes.

 

« Mais j’crois qu’j’suis devenu une bonne meuf
On m’parle dans la rue comme une bonne meuf
On m’suit dans la rue comme une bonne meuf
J’prends pas l’bus la nuit comme une bonne meuf
J’suis plus dans la vraie vie comme une bonne meuf
On m’parle et j’me méfie comme une bonne meuf »

 

Le second problème de ce « Damso Bashing » c’est qu’encore une fois, le couperet tombe sur le rap. Celui-ci est méprisé et pointé du doigt comme le vilain petit-canard des médias, et ce, encore à cause du fait que les acteurs médiatiques et les organisations institutionnelles (féministes notamment) sont issus de classes sociales hétéro-normées qui n’ont aucune connaissance des codes du hip-hop et de sa culture. Mais le désamour du rap et des médias est une autre histoire que nous avons déjà abordée il y a quelques mois…

 

Le fait qu’une association féministe fasse interdire le titre de Damso ne fera pas avancer la cause, surtout auprès de la nouvelle génération pour laquelle le rap est le premier style musical écouté. Ces associations n’ont pas pris le temps de comprendre le style et ses enjeux.

Bien souvent, ces enjeux se rapprochent de ceux du féminisme. Par exemple, dans le féminisme comme dans le rap, la parole est celle d’une population stigmatisée et opprimée par le système patriarcal et normé.

Au lieu d’investir le rap, de l’utiliser et de le valoriser pour servir leur cause, ces associations féministes préfèrent fermer les yeux, foncer dans le tas et se battre becs-et-ongles avec les portes voix du rap.

 

Dernière pierre à l’édifice bête et méchante, mais le rap n’est-il pas simplement le reflet de la société actuelle et par conséquent inspiré du traitement quotidien de la femme ? Si.

Donc commençons par soigner cette phallocratie ambiante à travers des politiques culturelles et éducationnelles tenant la route au lieu de traiter le problème en surface (et en prenant les rappeurs comme responsables du machisme chez les jeunes).

 

Pour revenir à Damso, celui-ci a répondu à ses détracteurs en balançant un extrait de l’hymne nommé Humain.

 

Ici, ce n’est pas le personnage égocentrique au degré de testostérones supérieur à la moyenne qu’on peut trouver dans Ipséité, qui nous offre ce titre, mais l’homme aux volontés fédératrices.

 

« J’crois que le plus intelligent,

Serait d’avouer qu’on est con

Serait d’avouer qu’on est blanc

Noir ou quel que soit le ton

Voir ce que nous laisse le temps,

Croire en nous mais sans le « en »

Car qui sommes-nous vraiment,

Quand on l’est pas vraiment ? »

 

https://www.youtube.com/watch?v=xiyBCR5Br7M&ab_channel=TeddyVdck

Par Margaux Philippon.

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