Le groupe VvvV ouvre les hostilités au BT59 en première partie de Rendez-Vous. Un concert d’une heure plongeant la salle dans une atmosphère très sombre à la limite de l’angoissant.
Le public, se laisse timidement porter par la performance des deux musiciens, Bardou Jacquet et le Mage. Accompagnés de leur boîte à rythme et de leurs synthétiseurs, ils délivrent une sorte de synth wave un peu trop symphonique, un côté too much cherchant à réveiller les morts, en sacré décalage avec le style de Rendez-Vous.
Les jeux de lumières ne nous laissent pas apercevoir leur visages, passent du rouge sang au blanc et parfois même nous plongent dans l’obscurité la plus totale, renforçant ce sentiment d’épouvante.
A l’exception de quelques-un, le groupe bordelais ne conquiert pas tellement le public, qui semble assez hésitant. La grande majorité attendait avec impatience le groupe Rendez-Vous.
Décidément, la programmation de l’Iboat, délocalisé pour quelques soirs au BT59, n’en finira pas de nous étonner. Des groupes calibrés comme She Past Away, Lebanon Hanover ou Fixmer/McCarthy nous ont récemment fait voyager dans les méandres des sonorités froides et métalliques, mais c’est sans hésitation la puissance de Rendez-Vous qui nous a le plus surprises.
Ce qui frappe d’emblée avec Rendez-vous c’est cette timidité, cette retenue dont ils font preuve en interview, puis cette rage déversée quelques minutes plus tard sur scène. En quelque sorte, cette sincérité et cette bienveillance quand nous discutons avec les cinq membres du groupe, sans jamais trop en faire, contrebalancent la violence musicale qu’ils produisent dans leur dernier album Superior State sorti en 2018, et plus encore en live.
“I did something wrong” susurre Francis, un des deux chanteurs du groupe, comme une repentance feinte, devant un public cosmopolite, entre vieux punks aux cheveux gris estampillés 666 dans le cou et adolescents qui se défoulent lors des nombreux pogos qui ont ponctué la soirée.
La maîtrise scénique est sobre mais terriblement efficace, la basse résonne entre synthés saturés et coups de poings sur le pad. Nous comprenons mieux pourquoi un des membres du groupe nous affirmait juste avant le concert préférer les petites salles aux gros festivals. Ils joueront d’ailleurs à Dour prochainement et nous les avions vus au Climax en 2018 beaucoup moins motivés par l’ambiance. La proximité renforcée crée une émulation unique sur des morceaux comme “Distance” ou “Sentimental Animal”.
Le batteur, dernier arrivé dans le groupe, donne une dimension instrumentale plus brute, peut-être aussi plus punk/métal, même s’il semble définitivement impossible de catégoriser Rendez-Vous selon un style. Et eux n’y tiennent absolument pas; les mettre dans un carcan de groupe engagé, de punks critiques envers la société ne leur plaît pas, et ils ont bien raison. “And I try to find a way, to get out”, la première phrase de “Sentimental Animal” résume assez bien leur état d’esprit, Rendez-Vous tente avant tout de fuir ceux qui résument leur musique à des influences et à une pâle copie d’un groupe passé avant eux. Tous les artistes post-punk ne se revendiquent pas de Joy Division, et seule compte leur créativité, une inspiration qui leur vient de l’abstraction.
Emportées par la scénographie, entre ombres et lumières bleues derrière lesquelles nous apercevons à peine les musiciens, nous voyons bientôt la transpiration ruisseller sur leurs visages et les longs passages instrumentaux finissent d’exciter un public déjà conquis.
Interview de Rendez-Vous
Lily Decorse & Nina Kulundzic