Après la fièvre post-punk que nous a procuré Peter Hook and the Light mercredi soir, on se tourne vers la programmation la plus électronique de Bordeaux Rock, mais aussi la plus pointue.
Une affiche aux allures post-industrielles quasi soviétiques nous prévient : ce sera une nuit placée sous le signe de légendes de l’EBM, aux côtés de la formation Fixmer/Mc Carthy et Patrick Codenys de Front 242.
FIXMER/MCCARTHY
Fixmer/McCarthy, c’est le genre de rencontres artistiques qui apparaît comme une évidence, une rencontre chimique violente entre la techno sensiblement EBM de Terrence Fixmer (FR) et la voix légendaire de Nitzer Ebb : Douglas McCarthy (UK). C’est en 2002 qu’ils décident de se réunir sur une forme complètement novatrice qui alliera leurs identités artistiques, musicales comme vocales.
Sur la petite scène de l’Iboat peu encline à accueillir des rock stars, quand Douglas McCarthy débarque, il en a pourtant la carrure. Chemise noire rentrée dans le pantalon et Ray Ban, McCarthy déambule de gauche à droite comme dans un trajet frénétique, en pointant du doigt ses adeptes, qui se composent autant de jeunes que de nostalgiques de Nitzer Ebb plus âgés.
On se dit immédiatement que l’on est en train d’assister au live d’un projet unique, d’un duo en synergie violente, qui avait d’ailleurs signé le retour de McCarthy après la déliquescence de Nitzer Ebb en 1995.
Les rythmes saccadés sur lesquels viennent se placer les cris de McCarthy, devant un public qui n’est plus à conquérir, engagent une danse frénétique et solitaire sur des tracks mythiques comme ‘Let Your Body Learn’, ‘Join in the Chant’ ou ‘Control I’m Here’. Une véritable performance dans une esthétique nihiliste et agressive, comme si la musique était un défouloir humain, le chanteur déverse sa haine, guidé par les machines de Fixmer. L’occasion également pour le duo de revenir sur leur dernier EP Chemicals, sorti en 2017 chez Sonic Groove.
FRONT 242 : Patrick Codenys
Inspiration majeure de Peter Hook, autre figure phare de la programmation de Bordeaux Rock 2019, Patrick Codenys de Front 242 s’est imposé vendredi soir devant un public déjà chauffé à blanc par Fixmer et McCarthy.
Premier groupe à employer le terme EBM pour qualifier leur musique, Front 242 fait connaître dès 1984 avec No Comment, un style industriel sans équivalent.
Patrick Codenys s’empare donc des platines pour un DJ set radical aux rythmes martiaux terriblement efficaces. Bien loin de la présence scénique de McCarthy, Codenys qui se retrouve désormais sans son partenaire vocal Jean-Luc De Meyer, nous délivre avec minimalisme et discrétion un set parfaitement maîtrisé, une preuve évidente que l’EBM n’a pas vieilli, mais au contraire revient en force, alternative à une techno qui se commercialise.
La soirée se déroule sous le signe d’une imagerie paramilitaire, et nous sommes guidés par des vocales qui sonnent comme des invectives terriblement exutoires. Une imagerie largement empruntée aux origines punk de l’EBM, qui débute avec le célèbre Warsaw de Joy Division.
L’Iboat, qui, le lendemain à peine, recevait Super Daronne, fait définitivement preuve d’éclectisme.
Lily