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Columbine, l’épopée grandiose des “enfants terribles”

Cela fait déjà trois ans maintenant que l’OVNI Columbine a officialisé sa séparation. Avec 3 albums, un EP, des singles et des featurings, le collectif a su développer une esthétique léchée, une signature musicale avant-gardiste et une plume percutante, authentique. Après avoir conquis des milliers de fans à travers l’Hexagone, vendu des milliers de tee-shirts et hoodies arborant leur emblématique logo de Colomb-kalash, les artistes rennais ont réussi à prouver qu’ils n’étaient pas seulement un collectif de rappeurs, mais un sentiment d’appartenance à part entière, une période de la vie de beaucoup d’auditeurs, un refuge, un exutoire pour bon nombre d’entre eux. Si le groupe n’existe plus aujourd’hui, la discographie du Crew continue d’influencer la scène rap de ces dix dernières années. 

Le collectif rennais Columbine formé en 2010, tire son nom de la tristement célèbre fusillade du même nom ayant eu lieu le 20 avril 1999 dans le lycée de Columbine au Colorado aux États-Unis. Ne cherchant en aucun cas à faire l’apologie de la violence ou des armes à feu, la bande cherche avant tout à rapper une mélancolie, une marginalité. Columbine c’est en quelque sorte le reflet de ce que pouvait sentir Eric Harris et Dylan Klebold, toute la symbolique qui entoure les deux criminels, la frustration de l’adolescence au sein du milieu scolaire, le passage à l’âge adulte. Jouant également avec la proximité du mot « colombe », Columbine pose ainsi les bases d’un univers fort, qui se reconnait dans leur logo emblématique de la « colomb-kalash ». « Le logo c’est un emblème fort, […] y’a une espèce de symbolique qui vient frapper direct et les gens captent. Il y’a ce rapport entre le bien et le mal et la colombe qui vient effacer la Kalash et tout ça quoi. » disait Lujipeka en interview chez 20 minutes. « Je pense que pour avoir la paix faut faire la guerre, un peu tu vois. T’as un désir d’amour et de liberté. C’est ça la révolution. » ajoutait Foda C chez AlohaNews. 

2k16 – Les débuts

Le groupe se forme donc en 2010 au lycée Bréquigny à Rennes et réunit plusieurs potes et colocataires parmi lesquels : Lujipeka, Foda C, Lorenzo (alias Larry Garcia), Sully, Chaman, Yro, Chaps et Sacha (alias Veskki). Le groupe intègre par la suite le Dj KCIV.  « On s’est rencontré au lycée. C’est une bande de potes en fait tout simplement. Après le lycée, on a décidé d’unir nos forces pour faire un collectif tous ensemble. » accordait Lujipeka à AlohaNews. Avec une volonté d’affirmer leur marginalité, le collectif se lance dans la production musicale de manière pleinement indépendante, ainsi le 17 août 2014, sort sur YouTube leur premier clip intitulé Charles-Vicomte, morceau qui critique ouvertement la jeune bourgeoisie. Écrit et interprété par Yro, produit par Foda C et réalisé par Larry Garcia, ce premier clip pose les codes d’un groupe décalé aux sonorités extravagantes. 

Quelques mois plus tard, le 19 octobre 2014, c’est au tour du morceau Bluray, interprété par Lujipeka, d’avoir son visuel sur YouTube. En novembre 2014 paraît le clip du morceau Fond de la classe de Foda C, dans lequel le rappeur décrit le quotidien d’un élève perturbateur assis au dernier rang, méprisant les professeurs et le système éducatif. Ces trois morceaux forment le premier EP du groupe intitulé 2k16, prônant pleinement leur comportement perturbateur, à contre-courant d’une jeunesse trop lisse et d’une bourgeoisie beaucoup trop formatée. 

Clubbing For Columbine – Un délire entre potes

Columbine continue de sortir des clips de plus en plus travaillés pour accompagner la sortie de nouveaux singles tels que Gracias, RIP, Marion ou encore Polo. C’est le 23 septembre 2015 que le Crew dévoile le teaser de leur premier album, qui sortira quelques mois plus tard le 1er janvier 2016. Avec le nom Clubbing for Columbine, le collectif fait référence au documentaire Bowling for Columbine du réalisateur Michael Moore, s’interrogeant sur l’origine du nombre d’homicides par armes à feu aux États Unis. Davantage conçu comme une mixtape qu’un véritable album, le projet de seize titres continue de dépeindre le quotidien des membres du groupe. Porté par des morceaux viraux tels que Dom Pérignon, dans lequel CharlesChaman et Foda C partent dans l’ego-trip parodique de jeunes bourgeois chez qui l’argent, la célébrité, et l’alcool coule à flots. L’excellent morceau Les prélis vient également porter haut et fort ce premier album. Pour ceux qui souhaiteraient une analyse poussée du morceau, Le Règlement s’en est chargé dans une excellente vidéo.

Abordant des thématiques profondes déjà mentionnées dans leur premier EP telle que la critique de l’institution scolaire et de l’autorité, le groupe développe également une profonde introspection sur leur solitude, leur rejet et leur inadaptation sociale. Toujours avec un ton léger, des flows autotunés et des phases d’autodérision, les M.C rappent leur vie, entre dépression, sexualité, déception et ennui. Malgré des visuels léchés et des productions toujours plus travaillées et réfléchies, l’album n’atteint pas le succès espéré par le groupe, néanmoins, à l’image d’un bon vin qu’on laisse vieillir pour mieux le savourer, l’album emmagasine les streams et les ventes année après année, et des morceaux à l’image de Les Prélis deviennent des classiques du groupe en transcendant ce premier projet studio. 

Enfants terribles – Les portes du succès

Le 19 février 2017, les fans du Crew s’affolent, les artistes libèrent le premier single issu de leur futur album. Le titre Enfants terribles, éponyme du deuxième album studio du collectif, annonce la couleur d’un album encore plus introspectif et davantage sérieux qui semble s’éloigner du côté parodique ou second degré qui avait marqué le début de leur carrière. Finalement dans les bacs le 21 avril 2017, Enfants terriblesmarque un tournant dans la discographie du groupe. Succès à tous les étages, ce projet explore de nouvelles sonorités plus rocks, jazz, et affirme le talent du duo emblématique Lujipeka et Foda CEnfants terribles à travers des titres comme RémiEnfants terribles et Temps électriques fait l’éloge d’un ennui bon, d’une vie monotone, contemplative, dépressive. « Poto je m’inquiète, arrête tout ça, trouve-toi un taf. Assis sur un banc j’attends sagement que le temps passe. » sur Enfants Terribles ou « Mais crois-moi, vivre isolé c’est blessant, j’en fais les frais des mois durant. Une belle année est une année à perdre son temps » sur Temps Électrique« C’est un peu un album qui parle d’ennui. Le but c’est de sortir de nos chambres et de sortir de notre ennui grâce à cet album. C’est ce qu’on fait à travers la tournée, à travers tout ce qui se passe en ce moment. Mais ouais, c’est l’un des thèmes principaux abordés dans ce projet. C’est un projet assez introspectif au final, propre à nous-mêmes. On s’ennuyait quand on l’a fait. » confiait Lujipeka à AlohaNews.« C’est un album qui parle d’ennui pour casser cet ennui. » ajoutait Lujipeka chez Radio France. Positionné à la 8e place du Top albums France et à la 44e place du Top albums Belgique, l’album est certifié disque d’or sept mois plus tard. Le collectif tient sa promesse et fait brûler sa certification en vidéo, peaufinant toujours plus leur ADN décalé refusant presque le succès qui est le leur. 

Avec un tel engouement, et des milliers de fans qui s’identifient à cette vie triste mais tellement vraie, le groupe démarre une tournée nationale d’une quarantaine de dates à partir d’avril 2017 et devient le porte-parole d’une jeunesse en souffrance. Foda C conscient du nouveau statut qui est le leur racontait à AlohaNews : « Pour te dire, on reçoit énormément de messages privés. On fait les assistantes sociales un peu. Tu reçois des messages de meufs ou même de mecs qui n’ont pas confiance en eux, qui parlent de tendances suicidaires. Ils nous demandent comment réagir face au harcèlement scolaire par exemple. On reçoit beaucoup de messages et on essaie de répondre au maximum. Notre public nous voit comme des grands frères, limite des héros. On essaie de calmer le jeu là-dessus. » À l’occasion de cette tournée, Columbine lance leur boutique de vêtement, et propose à l’achat tee-shirts, hoodies, ou goodies arborant leur célèbre logo. Il n’en fallait pas plus pour que la propagande Columbine dépasse la sphère du rap underground, les fans se revendiquent enfants terribles, le crient haut et fort, et l’arborent fièrement. « Je sais qu’il y a beaucoup de gens qui portent notre marque sans forcément kiffer le groupe, tu peux porter le logo parce qu’il est fort. » racontait Lujipeka chez 20 minutes. 

Pierre, feuille, papier, ciseaux – Un hymne

Le 4 août 2017, sort un nouveau single de Lujipeka et ChapsPierre, feuille, papier, ciseaux (PFPC). Véritable déflagration chez les fans qui avaient déjà pu entendre une maquette du son sur un live Instagram de Lujipeka, ce titre s’impose rapidement comme l’hymne de toute une communauté. Avec sa cover culte (Lujipeka allongé dans un canapé), des accords de piano simples, des flows lents et monotones, des paroles percutantes, PFPC conquiert la toile et les auditeurs rap, diffusant encore et toujours la vague Columbine. PFPC est un condensé de ce que le groupe sait faire de mieux, raconter une histoire qui parle à tous. Le jeune homme décrit dans la chanson, à la fois solitaire et marginalisé, est représentatif d’une génération en quête d’identité, tiraillée entre ses désirs et ses angoisses. Dès les premiers vers, le groupe nous plonge dans un univers sauvage et désordonné : « L’enfant terrible a les bras écorchés par les ronces », illustrant la violence de son existence. L’adolescent, n’a “pas peur de l’orage”, il se confronte à la tempête, symbolique ou réelle, sans se laisser abattre. Il ne craint pas de déranger, conscient qu’il n’a pas raison, et cela semble faire partie de son charme et de sa rébellion silencieuse. Se perdant dans ses pensées alors que les engrenages de la machine monde dont il fait partie continuent de tourner inexorablement, il ne cesse jamais de rêver. Sa vie semble se résumer à des échecs qu’ils soient amoureux, « il aime faire l’amour en douceur, mais elle préfère quand il est dur », sexuels, « Du sexe sans capote, il est en stress après Sa copine qui avorte, il sait pas s’il regrette » ou sociaux, « Tout le monde reprend ses expressions sans l’créditer ». Ce qui marque profondément l’ambiance du morceau c’est l’aspect insignifiant de la vie de ce garçon, « Il sait qu’si demain il part la Terre continuera de tourner », « Dans sa sacoche toute sa p’tite vie elle tient ». Dans cette langueur, le dernier couplet apparaît comme une lueur, l’adolescent n’est plus seul, « Avec l’équipe, à la vie à la mort », il semble satisfait sentimentalement, « Elle lui dit qu’elle est bien dans ses bras », et sa carrière musicale semble avoir décollée, « Rien n’a changé il est juste à la mode ».Ce qui est intéressant, c’est que les paroles de la chanson permettent aux auditeurs de s’identifier à ce personnage, d’y voir également un témoignage, une rétrospection de la vie des membres du groupe ou encore un hommage rendu à Lorenzo (alias Larry Garcia) s’étant lancé dans une carrière solo prometteuse.  En bref, ce son est une ode à la banalité, à l’insignifiance, à boycotter son K-way sous la pluie, à rêver dans la cour de récréation sans se soucier du regard des autres. Une banalité qui, comme le précise Foda C dans le morceau Temps électriques, « L’enfant terrible je sais que c’est toi, viens-tu des bas-fonds ou des quartiers neufs ? Bref, au fond tous la même. » peut toucher n’importe qui. Columbine diffuse un message d’espoir pour tous ceux qui comme eux, sont terriblement différents. Le single sera certifié diamant 5 ans plus tard. 

Adieu bientôt – La consécration

Le 6 juillet 2018, le collectif sort le son Cache-cache premier single et hit de leur futur album. Le 7 septembre c’est au tour du single Adieu bientôt d’être diffusé sur les plateformes. L’album Adieu bientôt sort finalement trois semaines plus tard le 28 septembre. Le Crew nous livre alors un projet de plus d’une heure riche en production et en diversité musicale. Acclamé par la critique et par leur public, ce nouveau projet voit le groupe s’entourer des producteurs de renom que sont PonkoJunior Alaprod et Seezy. Loin du groupe l’idée de changer de patte artistique, « Ce sont des producteurs qu’on a croisés, et avec qui on s’est bien entendus, mais pour le reste, ça ne change pas d’Enfants terribles. […] On a revendiqué le côté homemade parce que c’était notre patte. Mais c’était aussi quelque chose qu’on faisait par défaut. On n’avait pas de moyens, personne ne nous envoyait de prods, donc on les faisait nous-mêmes. Maintenant, si on a l’occasion de croiser un producteur qu’on kiffe, et qu’il nous propose une prod qu’on aime bien, c’est évident, on la prend. » racontait Lujipeka aux Inrockuptibles. En résumé l’album Adieu bientôt c’est le chef d’œuvre du Crew, le projet reprend tout ce qui faisait la force du groupe en professionnalisant davantage le mixte, les flows, le choix des toplines, les variations de mélodies, etc. Foda C témoigne de cette volonté de sortir le projet parfait, « Avec l’expérience accumulée sur les deux albums précédents, on sait qu’on ne joue pas certains titres en live, parce que tel kick est pourri ou parce qu’on a mal chanté sur un autre. Là l’objectif c’était de se dire : “il n’y a aucun son qu’on laissera de côté, ils seront tous lourds et bien produits”. On ne veut plus de trucs faits à moitié : “ce son est bien, sans plus ? Il ne sera pas dedans”. On est plus exigeant. » Avec une telle recette, l’album ne pouvait que faire l’unanimité auprès du public, et à raison puisque celui-ci se vend à 20 000 exemplaires en première semaine et est certifié disque d’or en novembre 2018 et disque de platine en mai 2019. Véritable bijou, l’album propose des pépites qui me tiennent à cœur et que je vais maintenant aborder rapidement. 

Tout d’abord le son Âge d’or qui, un peu à la manière de Les prélis, est coupé en deux parties : tout d’abord nous avons le droit à une instru lente, un sample de Stairway to heaven de Led Zeppelin, qui vient accompagner le rap triste et déchirant de Foda C. En véritable témoin de son époque, l’artiste nous illustre la vision pleine de noirceur de son quotidien, entre remise en cause personnelle, alcoolisme, problèmes d’argent et déceptions. La deuxième partie beaucoup plus agressive vient transformer ce morceau en réel banger, Foda C continue de rapper sa vie d’artiste presque torturé. L’outro du morceau, un vocal parlé de Foda C, vient clore le son avec une dose de légèreté, l’artiste en pleine introspection semble résolue à vivre la vie qui est la sienne et qui, malgré certaines facettes néfastes, n’est peut-être pas si terrible. 

J’aimerais également aborder un autre coup de cœur, le morceau Bart Simpson, Même si ce morceau a connu le succès qu’il mérite, il reste à mes yeux toujours aussi beau et profond. Le titre s’ouvre avec les phrases suivantes : « Sur la gâchette j’ai Parkinson, tu nous aimes pour nos parties sombres. Tous les jours le même tee-shirt comme Bart Simpson, Do Ré Mi Fa puis j’ai touché le sol. » Jouant entre la proximité sonore de « nos parties sombres » et « nos partitions », on ressent le dilemme d’un artiste perturbé entre son art et ses secrets, son ombre et sa lumière. La suite du morceau suit la plume mordante de Lujipeka, qui ne cesse de faire référence à sa vie d’artiste et à ses tourments, « Des sapes sans tâches et des flashs par centaines j’finirai par m’en plaindre. », « Je sais pas lire une partition mais j’ai disque d’or », « Sur la scène du crime, en concert tous les soirs. »  Quoi de mieux pour conclure cet aparté que de lire les mots que Lujipeka a accordés à 20 Minutes, « C’est un peu une réponse à Enfant terribles, notre précédent album. Le plus grand enfant terrible de la pop culture, c’est Bart Simpson. Dans la chanson, je dis “tous les jours le même tee-shirt comme Bart Simpson”, parce qu’on porte énormément notre logo, il y a toujours un membre de l’équipe qui va l’avoir. Il y a un peu un côté cartoonesque d’être tout le temps habillé pareil. »  

Je vous invite vivement à écouter l’album dans son intégralité ; c’est une ambiance, un état d’esprit. On appuie sur Play, on se laisse bercer par des chansons aux touches chaudes et joyeuses, des lamentations qui nous guident dans la tempête, que dis-je, dans le vortex de création de ce duo si cru, si authentique. 

Adieu au revoir – La fin d’une histoire

Après un tel succès auprès des fans, le Crew se lance dans une tournée nationale pour faire vivre son projet. Enchaînant les concerts à guichets fermés, le groupe annonce en mars 2019 la sortie d’une réédition de l’album intitulé Adieu au revoir. Ce sont 10 nouveaux titres interprétés par Lujipeka et Foda C qui viendront compléter la première version de l’album le 5 avril. Anecdote amusante, la sortie de la réédition est repoussée deux semaines plus tard, le 19 avril pour éviter la sortie de l’immense album Deux frères de PNL. La réédition consolide la structure déjà excellente de l’album en ajoutant des morceaux mémorables à l’image de Bateau ivre ou du hit C’est pas grave. Après deux ans, la réédition est finalement certifiée double disque de platine.

C’est lors d’une interview chez Interlude le 20 juillet 2021 que Lujipeka fait taire définitivement toutes les rumeurs qui circulent sur les réseaux sociaux autour d’une possible fin du groupe. Lujipeka annonce la séparation définitive du groupe et cette déclaration était assez logique selon moi. En effet, lorsque l’on s’attarde sur les textes du groupe on a toutes les clés en main pour comprendre davantage les paroles. Ainsi dans BiographieFoda C nous dit « Sur Overwatch je joue Tracer, petit à petit je monte le ladder » ce qui montre sa passion profonde pour l’univers des jeux vidéo. De plus dans le titre Adieu bientôt, qui résonne comme une lettre d’adieu, Foda C se confie, « J’fais plus de sessions gaming que de sessions studio » comme si c’est amour du gaming primait petit à petit sur le rap et qu’il ne se retrouvait plus vraiment dans celui-ci. Cette vision est d’ailleurs confirmée par le retour de Foda C avec la création du studio de développement DRAMA et du projet Unrecord. De plus dans leur Fast and Curious chez Konbini, Lujipeka avouait s’identifier à la colombe tandis que Foda C confessait s’identifier davantage à la Kalash. Cela nous montre la dualité qui planait au sein du duo. C’est grâce à cette dualité que le groupe a connu un tel succès selon moi, un peu à l’image du Yin et du Yang, Foda C et Lujipeka était les deux faces d’une même pièce. Toutefois il y’a plusieurs phases dans les sons du groupe qui relèvent l’impossibilité pour la kalash de vivre en harmonie avec la colombe. D’autres théories s’intéressent à des querelles amoureuses ou des disputes profondes pouvant dater de 2016, je vous laisse le lien d’un article très intéressant à ce sujet : https://femilit.wordpress.com/2020/07/20/analyse-columbine-la-lente-histoire-dune-rupture/ 

Que sont-ils devenus ?

L’histoire du groupe rennais se termine donc après une carrière grandiose et une véritable épopée musicale. La fin de Columbine ne signifie pas pour autant la fin de sa pérennité, en effet, Lujipeka s’étant lancé dans une carrière solo, continue de performer des titres du Crew lors de ses concerts. La carrière de l’artiste semble maintenant sur une bonne lancée, après les deux EP L.U.J.I et P.E.K.A, l’artiste a sorti en 2021 son premier album solo Montagnes Russes porté par des titres comme Poupée russe. Lujipeka continue d’être actif sur la scène musicale avec la sortie de nouveaux EP ou de featurings sur les projets d’autres artistes.

Je pense que je n’ai pas besoin de présenter le personnage de Lorenzo. Ancien membre majeur du groupe, l’artiste a su s’imposer dans le paysage rap de l’Hexagone. Après avoir partagé le featuring Ce genre sur l’album Rien à branler, Lorenzo rend hommage au Crew dans le dernier album de sa carrière sur la track Lorenzo « Au final j’étais plus heureux, avant quand y’avait pas un eu’ à vivre à 6 dans un T2, Columbine jusqu’à l’infini. Du mal à dire qu’tout est fini, qu’rien ne sera jamais comme avant ». 

Comme je l’ai évoqué précédemment, Foda C s’est lancé dans l’industrie du jeu vidéo en confondant le studio de développement DRAMA. Le réalisme accru du premier teaser de studio devient rapidement viral et propulse le jeu vidéo Unrecord à la première place des wishlist sur Steam lors de son annonce.

En ce qui concerne les autres membres du groupe, Chaman a continué à collaborer avec d’autres artistes, notamment sur des projets en lien avec la scène rennaise. Bien qu’il soit moins présent sur le devant de la scène que Foda C, Lorenzo ou Lujipeka, il reste actif dans la production musicale et la composition​. Sully et les autres membres ont principalement participé à des morceaux spécifiques et sont retournés à des activités plus discrètes, souvent dans les coulisses de la musique ou en s’éloignant de l’industrie musicale après la fin de Columbine

Héritage

Il est vrai qu’aujourd’hui dans le paysage du rap français il n’y a pas d’artistes se revendiquant explicitement dans la lignée du groupe rennais, cependant, il est possible de rattacher cet ADN d’un rap introspectif, morose presque dépressif à de jeunes artistes qui ont basé leur signature musicale sur cette noirceur, sur cette déprime de solitude. Ainsi, on peut se tourner vers des artistes comme Luther, qui à travers le projet Garçon chante une solitude profonde. « La journée est bad longue, là j’en ai marre, il serait grand temps d’me cher-cou », « On est plein mais j’me sens solo dans la partie » peut-on entendre dans Garçon. De même, dans le morceau Blake et Mortimer, Luther nous dépeint sa réalité, « Tous les matins je m’habille comme si j’allais sortir, comme si j’allais quitter mon ordi, j’m’abrutis devant Rick et Morty. Mon rythme de vie devient mortifère, avec la flemme, on est comme Blake et Mortimer. J’veux le quotidien de Porcinet, mais ma détermination est morte hier ».

Selug & Senar sont également des artistes qui rappent des thèmes communs au Crew rennais. Leurs projets sont remplis d’une certaine mélancolie, d’une introspection touchante et d’une remise en question. Je conseillerais également le binôme Moji x Sboy, ce duo ne parle pas forcément tout le temps de leur solitude, les artistes préfèrent des sujets comme les relations amoureuses que leur fin soit joyeuse ou brutale.

Un dernier mot

Columbine est un groupe qui me tient beaucoup à coeur de part leur histoire et ce qu’il représente. J’invite tous ceux qui souhaiteraient en découvrir davantage sur le groupe à bien évidemment écouter l’ensemble de leur discographie et à aller faire un tour sur leur Soundcloud, pour y découvrir entre autres les excellentes Buvette Tape

Enjoy and stay tuned,

Julien Gogneau.

22/11/2024

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